– Ecoutez-moi bien, mes enfants…cette vision que j’ai eu sera surement la dernière.
Au Temple des Six, la tension était palpable. L’Ancien des Six Samouraïs toussota. Ses yeux fatigués semblaient lutter pour ne pas se refermer, comme si une pression quelconque implorait ses paupières de céder. On pouvait clairement voir le vieil homme lutter de toutes ces forces contre la fatigue. Le silence régnait dans la chambre, les Six samouraïs et leurs mentors attendant avec attention les paroles du vieil homme. Celui-ci ouvrit une nouvelle fois la bouche, et inspira longuement afin d’avoir assez de souffle pour raconter son récit.
– J’ai vu un immense champ de bataille, commença-t-il. C’était dans la région des plaines. Oui…J’ai clairement reconnu les grandes étendues verdoyantes caractéristiques de cette partie du Royaume. Pourtant, les prairies habituellement calmes étaient dévastées. Ma vision m’a montré des combats de toutes parts, d’une extrême violence…Une guerre totale entre plusieurs armées…
L’Ancien fit une pause qui lui permit, après cette première description, de reprendre son souffle. Ses disciples restèrent muets, désireux d’en savoir plus sur cette mystérieuse bataille.
– Il y avait bien entendu les Shien. Cependant, leur nombre n’avait rien de comparable avec ce que vous connaissez…Ils formaient une véritable marée humaine, une troupe de plusieurs milliers d‘hommes. Leur nombre d’avait d’égal que leur cruauté. Si vous les pensiez violants en temps de paix, vous auriez dû les voir, brutaux comme ils étaient, plongés e situation de guerre…De véritables bêtes féroces, les yeux injectés de sang, prêtes à tout détruire sur leur passage. Ils combattaient une autre armée qui semblait beaucoup plus hétérogène. On y trouvait de tout : des guerriers qui paraissaient expérimentés bien qu’âgés, mais aussi des mercenaires et des paysans. Ils étaient clairement moins nombreux, moins organisés aussi, mais luttaient avec vaillance et tenaient vraisemblablement tête à leurs adversaires. Leur chef, un jeune homme brun, possédait sur lui l’insigne de la dynastie des Shiranui. Il est possible qu’il s’agisse de la Résistance et du fameux Samouraï Shiranui dont vous m‘avez parlé…
Le vieux guerrier s’arrêta de nouveau, mais cette fois de manière involontaire. Il se mit à tousser, plus violement que la fois précédente, crachant un peu de sang sur ses draps de soie.
– Maitre ! cria l’Envoyée Des Six Samouraïs en se levant vers lui.
Le Chambellan, le regard vide, l‘écarta d’un revers de main.
– Laisse, Mizuho. Cela ne sert à rien.
A contrecœur, la guerrière retourna à sa place. Elle savait très bien qu’elle ne pouvait rien faire, mais voir l’homme qui leur avait tout appris à ce point affaibli ne pouvait que l’attrister.
– Ne vous inquiétez pas, mes enfants…reprit le doyen, qui se ressaisissait. Je réussirai à vous transmette ce message.
Il s’était redressé dans son lit, sans doute pour essuyer le sang qui coulait de sa bouche. Il pouvait à présent voir le visage de chacun de ses interlocuteurs. Voir son œuvre, deux générations de guerriers prêts à se battre pour leur royaume, l’emplissait de joie malgré la douleur. Il trouva alors la force de reprendre son récit :
– Les Shien et la Résistance n’étaient pas seuls. Il y avait là une troisième armée….Une armée étrange, comme je n’en ai avais jamais vu. De toute évidence, il s’agissait d’étrangers. Leur visage était blanc comme les nuages, leurs yeux bleus comme le ciel, leurs cheveux clairs comme le soleil lui-même. Tous étaient grands, musclés, et munis d’épées et de boucliers qui dépassaient l’entendement. Ils étaient équipés d’armures épaisses, mais dont la forme n’avait rien en commun avec celle des samouraïs. Beaucoup de ces guerriers hurlaient dans une langue incompréhensible, dont les syllabes étaient systématiquement hachées. Le sang sur leurs visages hargneux les rendait tout aussi terrifiants que les Shien eux-mêmes.
Les samouraïs se regardèrent sans prononcer mot. Aucun n’osait briser le silence quasi religieux qui s’était installé, mais tous avaient à peu près en tête la même chose. Cette armée était certes une terrifiante surprise, mais la description faite de ses soldats n’était pas sans leur rappeler une certaine personne.
– Nous…nous avons rencontré quelqu’un qui ressemblait à cela, lança finalement Kamon après une longue hésitation. Elle se faisait appeler Dame Guerrière et prétendait obéir à la Résistance.
– Il s’agissait en réalité d’une espionne qui a tenté de nous tuer lors de la bataille de la Cité aux Rizières, compléta Zanji. Mais elle ne semblait pas obéir aux Shien, allant jusqu’à refuser les ordres du gouverneur local. Peut-être agissait-elle directement sous les ordres de cette troisième armée ?
– Après tout, n’avait-elle pas parlé de l’« Oskidan », ou de quelque chose comme ça ? rappela Nisashi, qui avait la mémoire vive.
Ils se regardèrent tous, plongeant autant que possible dans leurs souvenirs.
– Oui. C’est possible.
– Quelque soit son nom, méfiez-vous de cette armée, continua l’Ancien. Le mystère qui l’entoure la dote d’un avantage stratégique. Il faut absolument prévenir vos alliés qui se préparent à affronter les Shien de deux choses : d’une part qu’il y a un autre ennemi tout aussi puissant que le Régime, et d’autre part qu’à cause de cet ennemi surprise, la guerre va se déclencher beaucoup plus tôt que prévu.
Pour Zanji[/yugioh, qui avait vu la forteresse de Tenkabito brûler et les villages s’insurger contre les Shien, le fait que la guerre était imminente était devenu une évidence. Mais pour les autres en revanche, qui devaient imaginer cette vision lointaine, ce fut une crispation supplémentaire que d’entendre cela.
– Dans combien de temps aura lieu cette grande bataille, d’après vous ? demanda Irou
– J’ai toujours eu des visions à très court terme. Cette bataille ne se produira que dans quelques jours. Peut-être trois, quatre, ou cinq. Mais guère plus.
– Seulement ?!
C’était le choc pour tous. D’ici peu de temps la guerre, la vraie, commencerait. Ils avaient bien senti le conflit s’intensifier lorsque la Résistance s’était imposée dans les Rizières, mais les samouraïs -excepté le lancier – n’avaient pas réalisé qu’ils en étaient arrivés là. Les petites missions isolées étaient désormais derrière eux. Ils devraient à présent combattre au jour le jour pour la survie de leurs idéaux.
– Il faut absolument prévenir le Samouraï Shiranui et ses hommes, insista leur mentor. C’est le seul moyen d’avoir une chance contre ces deux ennemis. La vision que j’ai eu montrait un combat terrifiant, extrêmement meurtrier. Mais peut-être, avec ces informations, pourrez-vous éviter le pire.
Le vieux maître voulut sourire. Ses lèvres se déformèrent pourtant sous l’effet de la douleur, et ce fut à la place un filet de sang qui en jaillit.
– Mes disciples, mes enfants…vous qui avez fait vivre l’Ordre que j’ai fondé…comme vous pouvez le voir, je n’en ai plus pour très longtemps. J’aurais vraiment voulu passer plus de temps auprès de vous, surtout à vous de la jeune génération que je n’ai pas pu côtoyer, alité comme je le suis depuis des mois.
– Maître….murmura Mizuho, la larme à l’œil.
C’était la première fois que les samouraïs la voyait exprimer ses émotions. Elle qui était d’habitude si froide semblait vraisemblablement bouleversée par ce qui se déroulait sous leurs yeux.
– Mais je suis content d’avoir pu partager une dernière vision avec vous. J’espère qu’elle vous sera utile. Maintenant, partez ! Rejoignez le front et aidez la Résistance à changer le destin de ce pays. Plus que jamais, le royaume à besoin des Six Samouraïs. Utilisez ce que l’Ordre vous a appris pour faire de nouveau régner la paix et la sécurité sur ces terres. Ceci est ma dernière volonté.
Lentement, ses paupières arrêtèrent de lutter, et se refermèrent délicatement. Le corps raide du vieil homme se détendit progressivement, se bras osseux se décontractant avec souplesse. Un dernier filet de sang coula le long de sa joue, mais ce dernier n’empêcha pas un sourire de se graver sur ses lèvres. Le corps qui souffrait il y a peu semblait avoir trouvé le repos.
– Maître….répéta Mizuho qui s’était mise à pleurer.
Le Chambellan, tout aussi ému, s’avança au chevet de l’Ancien. Il essuya avec délicatesse le sang qui s’était écoulé.
– Le meilleur moyen de lui rendre hommage est d‘exécuter sa volonté. Les Six Samouraïs prendront les armes.
Il y eut une approbation unanime dans la salle. Même s’ils n’avaient pas eu beaucoup l’occasion d’échanger avec le fondateur de l’Ordre, ils prendraient les armes sans hésitation. Chacun prit quelques instants pour se recueillir devant le doyen. Tour à tour, les samouraïs sortirent de la pèce, pour se retrouver dans le salon qu’ils avaient quitté. Des domestiques s’affairaient déjà près du corps du vieil homme, dans le but de le préparer pour la cérémonie funéraire. Après tout ce qui venait de se passer, il parut nécessaire au petit groupe de faire le point de journée.
– Nous avons beaucoup de choses à nous dire, commença le Chambellan, le seul qui était resté au Temple des Six depuis la montée des tensions. J’ai déjà entendu le récit de ceux qui viennent de chez Denko Sekka. Mais toi, Zanji, tu ne nous as pas raconté ce que tu avais fait pendant ce temps.
Le jeune lancier soupira. Le moment qu’il redoutait, celui des explications, était venu. Il savait déjà que ce que sa réponse ne plairait pas à ses camarades.
– Je suis allé affronter Tenkabito dans sa forteresse, déclara-t-il de but en blanc. Et je l’ai vaincu.
Un long silence parcourut la salle. Ce n’était plus un silence de respect comme face à l’Ancien, mais bien un signe de stupéfaction. Décontenancés, les samouraïs regardèrent Zanji droit dans les yeux, tentant d’y trouver un signe d’amusement quelconque. Pourtant, ce dernier ne semblait pas plaisanter.
– Peux-tu répéter ? demanda le Chambellan, visiblement stupéfait par cette annonce.
– Quand j’ai appris pour mon père, au temple de Denko Sekka…j’ai perdu tous mes repères. Je suis ensuite revenu ici, dans la région des Forêts où j’ai grandi. De retour dans mon village, j’ai appris que Tenkabito était celui qui, indirectement, avait causé la mort de ma mère…en plus de celle de mon père adoptif. Cette colère que j’avais en moi, depuis toujours, est remontée brutalement. Je n’avais qu’une seule personne contre qui la diriger : celui qui m’avait pris la famille que je connaissais, qui asservissait ma région depuis des années, celui même qui m’avait humilié peu de temps avant que je ne rejoigne l’Ordre. Pas un seul instant, je n’ai réfléchi aux risques que je prenais, aux conséquences de mes actes. Il fallait que la colère s’exprime.
Les camarades de Zanji avaient baissé les yeux, le regard dans le vide. Tous étaient partagés entre l’envie de réprimander leur camarade, qui avait agi une fois de plus en solitaire alors que les Six étaient censés formés un groupe uni, et leurs sentiments qui appelaient plutôt à la compassion, au regard des tiraillements qu’il avait dû connaître. Seul le Chambellan continuait de fixer de jeune samouraï dans les yeux.
– Est-ce que tu te rends compte de ce que tu as fait ?
– Je ne chercherai pas à justifier mes actes, répondit-il aussi sereinement qu’il le pouvait. Je sais que j’ai mal agit, et je suis prêt à en assumer les conséquences.
– Assumer ? répéta le vieux guerrier en durcissant le ton. Sais-tu au moins de quoi tu parles ? Tu aurais pu mettre en péril ce qui se construit dans l’ombre depuis des années pour un simple caprice !
Zanji ne répondit pas. C’était vrai. Qu’aurait-il bien pu rétorquer à cela ?
– Je me demandais à quoi pouvait correspondre cette fumée que l’on aperçoit derrière les arbres. Tout devient clair ! Même si tu as réussi l’impossible, c’est-à-dire battre à toi seul l’un des hommes les plus puissants du Régime, tu n’as pas pu empêcher cette petite expédition de tourner à l’émeute généralisée !
– Tenkabito a lui-même mis feu à sa forteresse peu de temps avant de succomber, expliqua le lancier. Les Shien qui s’y trouvaient se sont dispersés dans la région. A l’heure actuelle, les ninjas combattent dans chaque village au côté des habitants pour les repousser.
– Comment ?!
– Tu aurais dû commencer par là…glissa Irou. S’il y avait bien une information à nous donner, c’était celle-là.
– Donc, reprit le chambellan qui prenait sur lui pour maintenir un semblant de calme, tu me dis que ta promenade chez Tenkabito a crée un climat de guerre civile dans tous les villages de la région ?
– Oui, avoua Zanji. Mais sans leur forteresse les Shien sont faibles et peu organisés. D’ici demain matin, il est possible que nous ayons repris le contrôle de la régi….
– Idiot ! cria son mentor. Toute la subtilité des réseaux secrets de Résistants était d’agir dans l’ombre le temps d’être suffisamment puissants pour affronter les Shien dans les conditions qui nous arrangeraient. Nous avions presque réussi à accumuler ces forces, et à concentrer le conflit sur la région des Rizières. Mais toi, il a fallu que tu accélères le processus en déclarant la guerre aux Shien dans les Forêts !
– Les Rizières se situent à l’Ouest du royaume, et les Forêts à l’Est, fit remarquer Nisashi. Or le Château De Brume De Shien de Shien se trouve au centre du pays, entre ces deux régions. Nous seront donc séparés du Samouraï Shiranui et du reste de la Résistance.
– Mais c’est une chance ! répliqua Zanji, qui commençait à saisir les conséquences de ce qu’il avait engendré. La région des Forêts est sur le point de tomber entre nos mains, tout comme celle des Rizières. Si nous nous allions avec les ninjas, mais aussi les villageois, il est possible de prendre les guerriers du Régime en tenaille ! Ceux-ci se replieront dans la région des Plaines, au Sud des deux autres. C’est là que la vision de notre doyen aura lieu.
– Ton plan me semble bien optimiste, commenta le vieil homme.
– Admettez que ma virée en solo, même si elle viole certains principes de l’Ordre, a été positive, rétorqua Zanji. J’ai osé faire ce que vous, trop prudents, n’avez osé faire depuis tout ce temps. Et cela a payé.
– Tu as abandonné tes camarades, ignoré les directives de tes supérieurs, mis en péril les plans de la Résistance et ta propre vie, rappela son interlocuteur. Pour cela, tu devras être puni. Mais alors que la guerre est sur le point de commencer, nous ne pouvons pas nous payer ce luxe. L’Ancien t’as donné, au même titre que les autres, une mission à accomplir.
– J’accepte ma punition.
Il regarda longuement chacun de ses camarades, qui avaient relevé la tête, et ajouta :
– Je vous demande pardon, mes amis. Plus jamais je ne partirai seul. Dorénavant, les Six samouraïs combattront toujours à six.
Le Chambellan jeta un œil par la fenêtre. Son regard se posa sur les décombres qu’avaient laissé l’affrontement avec les Shien quelques heures plus tôt.
– De toute façon, le conflit était inévitable, même dans les Forêt. Ces hommes envoyés par le Grand Shogun Shien n’avaient à priori aucun rapport avec ceux de la forteresse. Et portant, ils étaient venus pour nous attaquer. Je suppose qu’à un certain point, la Résistance devient trop grosse pour rester cachée. Dans ce cas, nous…
Il allait continuer, lorsqu’il se rendit compte que du monde s’agitait au pied des restes du Portail des Six. La nuit empêchait de bien voir de loin, mais ils semblaient s’agir d’un groupe d’hommes armé. La horde était équipée d’armes de toutes sortes, du katana à la simple faucille.
– Qui êtes-vous ? demanda le Chambellan qui en quelques minutes seulement les avait rejoints.
De plus près, il put constater qu’il s’agissait pour la plupart de simples villageois. Il y avait là une trentaine d’hommes de 20 à 40 ans. Certains portaient des outils destinés à travailler la terre, improvisés pour l’occasion en armes. D’autres avaient en main des katanas de fabrication Shien qu’ils portaient maladroitement, armes sans doute dérobées à des veilleurs. Pourtant, un homme se dégageait du groupe. Il était le seul à porter une véritable armure se samouraï, accompagnée d’un katana qui n’avait rien à envier à ceux du Temple des Six. Son visage laissait transparaître une certaine expérience, malgré les nombreuses rides qui bordaient ses joues. Peut-être avait-il cinquante ans, mais cela ne l’empêchait pas de dégager une aura plus charismatique que celle de tous les autres hommes réunis.
– Je m’appelle Zanki. Je vis dans un des villages non loin d’ici, de l’autre côté des bois.
Il marqua une petite pause, comme pour se faire prier de continuer. Mais le Chambellan, qui se doutait bien qu’il n’avait pas terminé, le laissa continuer :
– Je suis un samouraï, comme vous. Ou tout du moins, je l’étais avant que les Shien ne prennent le pouvoir. Pendant toutes ces années, j’ai dû cacher mes armes et taire mon passé. Mais avec les récents évènements qui ont embrasé la région, j’ai compris que l’heure de reprendre les armes était arrivée. C’est pourquoi je viens à vous. Je souhaite m’allier à l’ordre des Six pour combattre le Régime.
– Zanki est très fort ! cria l’un des paysans derrière lui. On l’a vu à l’œuvre, croyez-moi. Sa lame rapide inflige des dommages fulgurants et mortels !
– Comment connaissez-vous l’Ordre ? répliqua immédiatement Chambellan. Pour beaucoup de gens aujourd’hui, les Six samouraïs ne sont rien de plus qu’une légende.
– Je vous l’ai dit, je suis un ancien samouraï, répliqua Zanki. J’ai toujours surveillé de près les évolutions du monde des guerriers, surtout à une époque comme la nôtre où ils se raréfient. Habiter non loin du temple m’a bien aidé à vous démasquer, je l’avoue.
– Et ces hommes ?
– Ce sont des habitants de mon village. Lorsque des gardes Shien ont débarqué pour piller notre village, ils se sont dressés contre eux à mes côtés. Ils n’ont peut-être pas l’expérience du combat, mais disposent d’un redoutable esprit de revanche contre le Régime.
– Ce n’est pas un cas isolé, commenta quelqu’un. Dans de nombreux villages, nous avons vu des cas similaires se profiler.
Les samouraïs comme les villageois se retournèrent, surpris, vers les bois. Dans aucun des deux camps, personne n’avait pris la parole. La voix venait semblait plutôt venir de l’orée de la forêt. Qui donc avait dit cela ? Peu de temps après, deux silhouettes se dessinèrent parmi les arbres. Zanji et les autres les reconnurent immédiatement : il s’agissait de deux ninjas, Goe Goe et le Ninja Argent Émérite.
– Les ennemis du Régime, ce n’est pas ce qui manque, continua Goe Goe en avançant vers eux. Maintenant que les langues se délient, réunir une coalition ne devrait pas poser trop de problèmes.
– Hanzo et les autres nous ont tout raconté, intervint le Ninja Argent Émérite. L’un des votre a bousculé nos plans en attaquant la forteresse de Tenkabito. Désormais, nous devons nous préparer à une guerre imminente.
Les trois groupes tombaient d’accord sur ce constat. Les ninjas, les samouraïs et les villageois sentaient que la coalition vaguement évoquée par Goe Goe tombait sous le sens.
– Nous devons unir nos forces.
Les différents guerriers se regardèrent. Pendant ce temps, la fumée dégagée par la forteresse montait de plus en plus haut dans le ciel. Mizuho, qui séchait ses larmes, venait de les rejoindre dehors. Elle qui était toujours en mission en dehors du Temple n’avait pas vu l’état de l’Ancien de dégrader, et devait faire son deuil avec la stupéfaction en plus de la tristesse. Le Chambellan se tourna vers les six samouraïs :
– Mizuho et moi, nous participerons à cette coalition. Le Temple des Six et ses armes seront à la disposition des villageois. Mais vous, samouraïs, vous avez une mission. Partez pour la région des Plaines, rejoignez la Résistance et informez-la. Dites à ses chefs qu’ils peuvent compter sur notre soutien, et prévenez-les de l’existence de cette seconde armée ennemie.
Chacun des Six regarda les deux mentors, ceux qui avaient constitué la première génération des Six samouraïs, avec intensité. Ils pensèrent aussi au Grand Maître, qui était toujours retenu au Château De Brume. Leur tour était venu, eux aussi devraient mener une guerre pour la survie du royaume. Peut-être était-ce d’ailleurs la dernière fois que tous se verraient, vivants. Quoi qu’il en soit, ils n’avaient pas le choix. Les informations qu’ils venaient d’obtenir leur apportaient une nouvelle Lueur d'Espoir. Et tant que cette lueur brillerait, ils devraient faire leur maximum pour la préserver.